La fin d’un bail commercial peut entraîner différentes difficultés, notamment celle de l’absence de remise des clés et du paiement d’une indemnité d’occupation. En effet, même si le congé donné à un bailleur répond au formalisme exigé en la matière, il n’en demeure pas moins que le preneur à bail (le locataire) doit satisfaire une dernière obligation pour être définitivement libéré d’une quelconque obligation vis-à-vis du bailleur. Cette dernière obligation qui peut sembler simpliste n’est néanmoins pas dépourvue d’effets juridiques. Il s’agit « tout simplement » de la remise des clés au bailleur à la fin du bail commercial.
Dans un arrêt de la Cour de cassation datant du 3 décembre 2020, la jurisprudence vient nous rappeler toute l’importance pour le preneur de prouver qu’il ne dispose plus des locaux loués avec notamment la remise effective des clés au bailleur. Pour éviter tout litige suite à la remise ou à la non-remise des clés au bailleur, l’intervention d’un huissier de justice est à privilégier. Voici pourquoi…
Dans quel cas un preneur doit-il payer une indemnité d’occupation ?
Une indemnité d’occupation est due par un preneur qui continue de disposer des locaux qu’il louait malgré la cessation du bail. Dans les faits, il peut s’agir d’un locataire qui louait un local commercial à un bailleur et qui après la cessation du bail continue d’occuper ce local sans payer de loyer. Dans ce cas, pour dédommager le bailleur de son impossibilité de disposer de ces locaux, le preneur pourra être condamné à payer une indemnité d’occupation.
Ce qui est important de préciser ici est qu’il n’est pas nécessaire de prouver que le preneur continue d’utiliser les locaux pour le condamner à payer une indemnité d’occupation. Tant que le preneur peut continuer à disposer de locaux – en gardant par exemple les clés des locaux – ce dernier devra verser une indemnité d’occupation pour toute la période où il peut disposer des locaux depuis la cessation du bail.
Comment éviter de payer une indemnité d’occupation ?
Après la cessation du bail, un locataire n’a pas forcément la volonté de continuer à disposer des locaux loués. Pourtant, si ce dernier ne peut prouver la fin effective de la mise à disposition de ces locaux avec notamment un état des lieux de sortie et une remise des clés au bailleur, il peut s’exposer au paiement d’une indemnité d’occupation au bénéfice du bailleur.
Par conséquent, lorsqu’un preneur souhaite mettre fin à un bail, il est important que ce dernier effectue :
• un état des lieux de sortie avec le bailleur ;
• une remise de toutes les clés des locaux loués au bailleur.
Qu’en pense la jurisprudence ?
Une fois n’est pas coutume, la jurisprudence actuelle se montre relativement protectrice à l’égard du bailleur concernant l’application d’une indemnité d’occupation. En effet, nul besoin de prouver que le preneur utilise effectivement les locaux pour que ce dernier soit redevable d’une indemnité d’occupation à l’égard du bailleur. Après la cessation du bail, le simple fait de détenir les clés du local qui faisait l’objet du bail amène le paiement d’une indemnité d’occupation par le preneur au bénéfice du bailleur.
C’est notamment ce qu’a confirmé l’arrêt de la Cour de cassation en date du 3 décembre 2020 (3è Civ., n°19-22.443). Dans les faits, un preneur d’un bail commercial a donné congé à son bailleur en respectant la procédure exigée en la matière. Cependant, le preneur a gardé les clés de ces locaux loués après la cessation du bail commercial et ceci pendant plusieurs mois.
En soi, le preneur a donc détenu les clés de ces locaux pendant plusieurs mois sans qu’un bail commercial soit conclu pour cette période. Par conséquent, le bailleur a demandé le paiement d’une indemnité d’occupation durant toute cette période n’ayant pas fait l’objet d’un bail commercial, mais durant laquelle le preneur a gardé les clés de ces locaux.
Ce litige est porté devant la cour d’appel de Grenoble qui rejette la demande d’indemnité d’occupation du bailleur. Celui-ci se pourvoit donc en cassation.
La Cour de cassation en l’espèce considère que l’arrêt doit être cassé concernant le refus de la demande de paiement de l’indemnité d’occupation par le bailleur, car le preneur ne peut pas en l’espèce prouver la remise des clés au bailleur durant cette période ou le refus du bailleur de recevoir les clés.
Comment prouver la bonne remise des clés au bailleur ?
Cette jurisprudence nous rappelle toute l’importance de pouvoir prouver la bonne remise des clés à son bailleur pour éviter de payer une indemnité d’occupation. Même si les clés ont été effectivement remises entre les mains du bailleur, ce dernier peut nier cette remise des clés. Pour éviter tout litige concernant la remise des clés à la fin d’un bail, un huissier de justice peut procéder à la remise des clés au bailleur pour le compte du preneur.
Dans ce cas, le bailleur ne pourra pas nier avoir reçu les clés des locaux jusqu’à présent loués par le preneur. De plus, si le bailleur refuse de recevoir les clés, l’huissier de justice pourra dresser un procès-verbal dans lequel il décrira le refus du bailleur de recevoir lesdites clés. En cas de litige porté devant un tribunal, le preneur pourra ainsi facilement prouver sa bonne foi et sa volonté de remettre les clés au bailleur en temps et en heure après la cessation du bail commercial, afin de ne pas devoir payer d’indemnité d’occupation.