Le droit français incite à une résolution amiable des conflits entre des cocontractants. Ce constat vaut pour les litiges locatifs.
Mais lorsqu’un accord est trouvé entre les parties, quels sont ses effets sur la continuité du contrat ? Un tel accord peut-il exclure les effets du caractère illicite d’une clause au contrat ? La Cour de cassation dans un arrêt du 16 mai 2024 est venue clarifier les effets de l’autorité de la chose jugée provenant d’un protocole transactionnel.
Rappel : qu’est-ce qu’un protocole transactionnel ?
Le protocole transactionnel est défini par l’article 2044 du Code civil qui dispose que « La transaction est un contrat par lequel les parties, par des concessions réciproques, terminent une contestation née, ou préviennent une contestation à naître. Ce contrat doit être rédigé par écrit. »
Ce type de contrat représente donc un mode alternatif de règlement des conflits (MARC) et implique une renonciation de régler le litige concerné devant les tribunaux. De ce fait, un protocole transactionnel peut être assorti d’une indemnité transactionnelle pour la partie lésée.
Protocole transactionnel en présence d’une clause illicite : quelles conséquences ?
En l’espèce, la Cour de cassation est amenée à se prononcer sur le sort d’une clause illicite suite à un protocole transactionnel. Dans les faits, un locataire d’un bail commercial a signé un protocole transactionnel avec son bailleur, avec une indemnité transactionnelle. Un nouveau contrat de bail a par la suite été rédigé et signé entre les parties.
Par la suite, le locataire a assigné son bailleur aux fins de voir déclarer réputée non-écrite la clause d’indexation qui été insérée au contrat de bail initial. Cette demande a été rejetée par la Cour d’appel.
Le locataire se pourvoit ensuite en cassation, sur le fondement de l’article L112-1 alinéa 1 du Code monétaire et financier qui dispose que « Sous réserve des dispositions du premier alinéa de l’article L. 112-2 et des articles L. 112-3, L. 112-3-1 et L. 112-4, l’indexation automatique des prix de biens ou de services est interdite. » Le locataire considère ainsi le bien-fondé de sa demande de restitution des loyers impayés au titre de l’application de cette clause d’indexation illicite, quand bien même un protocole transactionnel a été par la suite signé avec le bailleur.
Or, la Cour de cassation rappelle dans cet arrêt l’autorité de la chose jugée d’un protocole transactionnel. En d’autres termes, la haute juridiction rappelle le principe de renonciation de régler les litiges faisant l’objet de ce protocole transactionnel devant un juge. L’illicéité d’une clause insérée dans le contrat initial ne permet pas de déroger à ce principe. De ce fait, la demande du locataire est jugée irrecevable.
Quels effets sur les clauses d’un nouveau contrat ?
Dans ce même arrêt, la Cour de cassation est également amenée à se prononcer sur l’interprétation d’une clause concernant le nouveau contrat de bail, signé après le protocole transactionnel.
Dans ce cas, le locataire estime que le paiement au titre de la taxe d’enlèvement des ordures ménagères n’a pas à être intégré dans les charges récupérables par le bailleur stipulées dans le contrat. Ce dernier motive sa demande sur le fondement qu’il n’a pas été fait expressément mention de la taxe des ordures ménagères dans les charges qui lui incombent. Sur ce point, la Cour de cassation casse et annule l’arrêt de la Cour d’appel de Versailles en ce qui concerne seulement le rejet de la demande de remboursement du locataire concernant la taxe d’enlèvement des ordures ménagères.
Ainsi, l’on peut constater deux différences de traitement concernant les demandes du locataire. Ces deux demandes présentent un fondement légal. Cependant, la demande concernant un contrat ayant fait l’objet d’un protocole transactionnel a été jugée irrecevable en consacrant pleinement l’autorité de la chose jugée de cet accord.
Les parties au contrat sont donc invitées à se faire accompagner dans le processus de médiation d’un protocole transactionnel, afin de ne pas renoncer involontairement à une action judiciaire.