L’entrée en vigueur de la loi Kasbarian entraîne une réduction du délai entre un commandement de payer et la constatation de l’application de la clause résolutoire en cas de loyers impayés. Cette loi soulève bien des questionnements concernant son application. La Cour de cassation a ainsi été invitée à se prononcer sur ce sujet dans un avis du 13 juin 2024...
Que dit la loi Kasbarian au sujet de la clause résolutoire ?
La loi n° 2023-668 du 27 juillet 2023 visant à protéger les logements contre l’occupation illicite – dite loi Kasbarian — a pour objet de mieux protéger les bailleurs face à l’occupation illicite de leur logement.
Cette occupation illicite est notamment constatée lorsque le locataire ne paie plus le loyer. Dans ce cas, un bailleur peut prévoir une clause résolutoire dans le contrat de bail l’autorisant à mettre fin au contrat de bail en cas de loyers impayés.
Avant la loi Kasbarian, le délai minimal à respecter pour constater l’application d’une clause résolutoire était de 2 mois à compter du commandement de payer. Depuis l’entrée en vigueur de cette loi, le délai minimal est de 6 semaines (article 10), soit un délai plus court permettant une action plus rapide de la part des bailleurs.
Interprétation de la loi : quel est l’avis de la Cour de cassation ?
La Cour de cassation a reçu une demande d’avis comprenant différentes interrogations au sujet de l’application de cette loi à l’occasion d’un litige opposant bailleur et locataire.
Tout d’abord, la Cour de cassation était invitée à présenter sa position concernant l’application de ce nouveau délai aux contrats de bail conclus avant la date d’entrée en vigueur de cette loi. Sur ce point, la Cour de cassation répond sans détour : l’application de cette loi n’a pas d’effet rétroactif. De ce fait, seuls les contrats de bail conclus après l’entrée en vigueur de cette loi sont concernés par ce nouveau délai.
Les clauses résolutoires stipulant un délai minimum de 2 mois entre la délivrance du commandement de payer et la constatation de l’acquisition de la clause résolutoire dans les contrats de bail conclus antérieurement à la loi Kasbarian restent donc applicables.
Le tribunal à l’origine de la demande d’avis questionne également la Cour de cassation sur les contrats reconduits tacitement après l’entrée en vigueur de cette loi. Ce cas de figure n’étant pas présent dans le litige faisant l’objet d’une demande d’avis, la Cour de cassation ne répond pas et juge cette question irrecevable.
Au vu de la jurisprudence antérieure, on peut légitimement présager une application du délai en vigueur à la date de la conclusion du contrat de bail initial. Dans tous les cas, les juges seront invités à prendre en considération la volonté des parties.
Quels sont les points de vigilance ?
L’avis rendu par la Cour de cassation sur l’application du nouveau délai de constatation de la clause résolutoire confirme ainsi l’application possible de 2 délais légaux :
- un délai de 2 mois pour les contrats conclus antérieurement à la date d’entrée en vigueur de la loi Kasbarian et possiblement pour les contrats reconduits tacitement ;
- un délai de 6 semaines pour les contrats conclus postérieurement à l’application de cette loi.
Les bailleurs sont donc invités à être vigilants concernant le délai légal applicable. Le risque est d’appliquer un délai de 6 semaines conformément à la loi Kasbarian pour un contrat dont le délai de 2 mois continue à s’appliquer. Dans ce cas, le juge peut prononcer l’irrecevabilité de l’assignation provenant du bailleur.
Les commissaires de justice se tiennent présents aux côtés des bailleurs pour veiller au respect du délai applicable à chaque contrat de bail.