Les troubles anormaux du voisinage font l’objet d’une importante jurisprudence, tant les conflits sont nombreux et amènent différentes interprétations. Face à une jurisprudence abondante, le législateur s’est vu incité à consacrer cette notion dans le Code civil. Cette intégration dans le Code civil fait notamment écho à un pressant besoin de clarification face aux nombreux conflits qui ont émergé suite au confinement.
Voici comment le législateur en 2024 interprète le trouble anormal du voisinage et quels changements sont à prévoir pour la résolution des conflits à venir.
La notion de trouble anormal du voisinage enfin reconnue dans le Code civil
La notion de trouble anormal du voisinage a évolué ces dernières décennies. Les sources de conflit se sont multipliées, avec par exemple de nouvelles nuisances telles que le bruit de fonctionnement des systèmes de pompes à chaleur.
De même, l’après Covid a entraîné un mouvement massif d’emménagements à la campagne. Certains néo-ruraux ont eu des difficultés à s’acclimater aux nuisances sonores (ex. : son des cloches de l’église, chant du coq…) ou olfactives (ex. : odeur d’une ferme avicole, bovine, porcine…).
Face à ce constat, le législateur a intégré la notion du trouble anormal du voisinage au sein de l’article 1253 du Code civil par la loi du 15 avril 2024 visant à adapter le droit de la responsabilité civile aux enjeux actuels.
De la jurisprudence à une reconnaissance législative : quels changements ?
Concrètement, la reconnaissance législative du trouble anormal du voisinage clarifie les conditions pour dénoncer un dommage subi sur ce fondement.
Jusque là, la jurisprudence laissait une marge d’interprétation relativement large quant à ces nuisances. Certaines situations pouvaient ainsi être interprétées différemment selon chaque tribunal.
Concrètement, cette intégration dans le Code civil permet d’encadrer l’interprétation de ces nuisances anormales afin d’éviter de trop grandes disparités d’interprétation sur le territoire français.
Quelles sont les nouvelles conditions pour dénoncer un trouble anormal du voisinage ?
L’article 1253 du Code civil pose clairement les conditions pour dénoncer un trouble anormal du voisinage ainsi qu’une liste limitative d’exceptions.
Les principales conditions sur le fondement du nouvel article 1253 du Code civil sont :
• d’engager la responsabilité d’un occupant des lieux, qu’il soit propriétaire, locataire, sans titre, avec autorisation d’exploiter les lieux ou maître d’ouvrage ;
• de dénoncer un trouble considéré comme anormal (ex. : nuisances sonores, olfactives ou visuelles) par rapport aux troubles normaux tolérés (ex. : bruit de la tondeuse aux heures de tonte autorisées) ;
• d’apporter la preuve d’un dommage matériel ou immatériel causé par ce trouble anormal.
Afin d’encadrer les possibles dérives face à l'interprétation des nuisances constatées, le législateur est venu également intégrer une liste limitative d’exceptions.
Ainsi, toute personne estimant subir un dommage dû au voisinage ne peut pas fonder son action en justice sur le trouble anormal du voisinage lorsque :
• le trouble est causé par un occupant temporaire (ex. : un professionnel intervenant temporairement sur les lieux) ;
• le trouble est pré-existant à l’emménagement des plaignants ;
• le trouble fait suite à des aménagements dans le monde agricole pour une mise en conformité.
Bien évidemment, ces exceptions sont pleinement applicables que si le fait générateur est conforme aux lois et aux règlements. Dans le cas contraire, le plaignant pourra fonder son action en justice sur le non-respect de la loi ou du règlement concerné.
Si vous estimez subir un trouble anormal du voisinage, n’hésitez pas à vous faire conseiller et accompagner par un professionnel du droit. Un commissaire de justice pourra notamment réaliser un constat de commissaire de justice afin de bénéficier d’un élément de preuve irréfutable jusqu’à preuve du contraire pour prouver le bien-fondé de votre action devant le juge.