La Cour de Cassation confirme la résiliation d’un bail pour un trouble de jouissance causé dans les parties communes de l’immeuble par le fils de la locataire.
Le non-paiement d’un loyer n’est pas le seul fait pouvant entraîner la résiliation d’un bail d’habitation aux torts du locataire. En effet, le locataire doit également garantir un usage paisible de la chose louée et de ses accessoires. Sur ce point, les appréciations peuvent être diverses et variées. Toute la complexité d’invoquer un trouble ne permettant pas un usage paisible des lieux loués provient notamment de la difficulté de juger de la gravité de ce trouble. En outre, la jurisprudence tend de plus en plus à élargir l’appréciation de ce trouble qui — selon sa gravité — peut-être indépendamment commit dans les lieux loués ou à l’extérieur des lieux loués pour être un motif de résiliation d’un bail d’habitation.
En effet, la Cour de cassation dans un arrêt du 17 décembre 2020 (3e Civ., n° 18-24.823, FP-P+B+I) se prononce sur ce point. Son appréciation confirme qu’un trouble d’une importante gravité — qu’il soit commis ou non dans les lieux loués — peut justifier la résiliation d’un bail d’habitation. Pour prouver l’étendue et la gravité d’un tel trouble, un bailleur peut demander un constat d’huissier. Nous vous expliquons plus en détail pourquoi…
Rappel des obligations du locataire
L’article 1728 du Code civil dispose que « Le preneur est tenu de deux obligations principales :
1° d’user de la chose louée raisonnablement, et suivant la destination qui lui a été donnée par le bail, ou suivant celle présumée d’après les circonstances, à défaut de convention ;
2° de payer le prix du bail aux termes convenus. ».
Dans ce cas, l’usage raisonnable de la chose louée fait notamment référence à la jouissance paisible des lieux loués. En d’autres termes, un locataire s’engage à ne pas troubler la tranquillité des lieux qu’il loue.
Dans le cas contraire, l’article 1729 du Code civil dispose que « Si le preneur n’use pas de la chose louée raisonnablement ou emploie la chose louée à un autre usage que celui auquel elle a été destinée, ou dont il puisse résulter un dommage pour le bailleur, celui-ci peut, suivant les circonstances, faire résilier le bail. ».
Par conséquent, un bailleur qui peut justifier d’un dommage résultant d’un trouble causé par son locataire est en droit de résilier le bail d’habitation.
Le trouble peut être causé à l’extérieur des locaux loués
Cet arrêt de la 3e chambre civile de la Cour de cassation en date du 17 décembre 2020 vient confirmer qu’un trouble causé par un locataire à l’extérieur des lieux loués — mais en rapport direct avec le bail d’habitation — peut entraîner la résiliation de ce bail à l’initiative du bailleur.
En l’espèce, le fils de la locataire a commis des actes de violence à l’égard des agents du bailleur. Le bailleur a donc procédé à la résiliation du bail commercial. Cependant, la locataire a contesté cette résiliation sur le fondement que les actes de violence de son fils ont été commis en dehors du logement loué et de ses accessoires (exemple : les parties communes d’un immeuble où se situe le logement loué).
L’affaire est portée devant la Cour de cassation. En l’espèce, la Cour de cassation estime que la Cour d’appel a justement retenu le fait que le fils de la locataire a commis des actes de violence directement envers les agents du bailleur. De ce fait, le lieu où ont été commises ces violences n’est pas un critère prédominant tant que ces violences commises ont un lien direct avec le bail d’habitation.
En l’occurrence, ici ces violences commises ont été dirigées envers les agents du bailleur, ce qui suffit à caractériser un trouble suffisamment grave pour justifier la résiliation du bail d’habitation.
Comment prouver un trouble suffisamment grave pour
justifier la résiliation d’un bail d’habitation ?
En tant que bailleur, certains comportements fautifs des locataires peuvent entraîner un trouble dans la jouissance paisible des lieux loués. Dans ce cas, le Code civil prévoit la possible résiliation du bail d’habitation. Cependant, le bailleur devra prouver l’existence d’un tel trouble et de sa réelle gravité sur la tranquillité des lieux loués.
Dans ce cas, et suivant la nature du trouble, un constat d’huissier peut être réalisé. Par exemple, s’il s’agit d’un locataire qui émet des menaces d’une importante gravité envers le bailleur par le biais d’une messagerie électronique ou des réseaux sociaux, le bailleur peut demander que soit effectué le constat d’un mail, d’un message via un réseau social, etc. Un bailleur pourra ainsi avoir entre ses mains un élément de preuve sur l’existence et le degré de gravité du trouble causé par le locataire pour justifier la résiliation du bail d’habitation.